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Sarlat-La Power ép 26

Bigre, comme il fait froid ! Passer toute la journée dehors en décembre, ce n’est vraiment pas humain. Bastien déteste l’hiver. Mais il est bien obligé de faire ses tours de garde du piquet, devant l’usine. Il y a du travail par-dessus la tête. Il ne dort que trois heures par nuit. Il a la chair de poule et il couve une pneumonie, toussant toutes les trente secondes, ce qui a le don de mettre en colère sa femme. Le brasero de rigueur ne réchauffe pas grand-chose.

Ce matin, ils reçoivent la visite de Roger devant l’usine. Le plombier ne décolère pas contre ce qu’il appelle la prise d’otages. « Elle a bien marché notre manifestation non ? », lui demande Hakim, emmitouflé dans des gants dans et sa doudoune blanche. Guy ne répond pas : « Pourquoi voulez-vous qu’il n’y ait plus de chômage ? Il y a des gens qui n’aiment pas travailler, il faut vous mettre cela dans le crâne ! »

Si tout le monde a un travail digne et bien payé, les artisans comme toi auront plus de clients, mec », réagit le syndicaliste. Guy a beau faire sa grande gueule, les démonstrations de force l’impressionnent. La manifestation d’hier avec ses 20 000 manifestants, ses télévisions venues de toute l’Europe, s’est déroulée sans incident hormis quelques rétroviseurs de voiture cassés. C’est un sacré succès. Depuis les ouvriers sont dans la rue, tenant des piquets dans la ville et sollicitant la générosité des passants pour la caisse de grève. 3 000 militants extérieurs se sont installés sur place jusqu’à nouvel ordre, ayant foi en la lutte des bœufs contre les lions.

« Je trouve justement que c’est un progrès, le cafiristanat français, reprend-il. Les allocations pour ceci, pour cela. C’est nous qu’on paye. Des gens peuvent vivre sans travailler. On a un État vraiment généreux. Il attire en masse les migrants d’ailleurs, et c’est pas près de s’arrêter ! Vous voulez quoi de plus ? »

« Tout le monde ne veut pas être migrant ou cafistanais, banane » répond Bouboule, qui s’est cassé le bras en tombant du mur de la rue Rousseau qui surplombe la rue de La République. « Si tu restes ici, tu vas devoir venir avec nous, on va aller faire un tour au siège de Plastar tout à l’heure, tu pourras amener ton petit matériel », lui lance Bastien. Les ouvriers réunis autour du brasero rigolent. Une colonne d’une centaine de militants approche. Tous sont munis d’un gourdin et coiffés du même bonnet fluo de running acheté chez Intersport.

Tag(s) : #Roman, #Feuilleton
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